Colloque Politiques de l’autisme partie 1 : Corps, fiertés et socialisme

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Description de l’image : début du colloque des politiques de l’autisme, on voit une traductrice en français avec Sarah Jane Harvey au centre, à gauche Shaun May modère le colloque, à droite Janine Booth attend son tour. En arrière plan, un écran dont le vidéo projecteur affiche “The politics of Autism : la politique de l’autisme”.

Le 24 juillet dernier, CLE Autistes a participé à un colloque organisé par Shaun May, chercheur à l’université de Kent dans les locaux de l’université de Colombia sur Paris. Quelques activistes autistes anglais ont été invités pour nous parler des politiques de l’autisme au Royaume-Uni et des initiatives afin de comparer avec le cas français.

For english autistic activists, we share the translation of our common symposium with Shaun may, Agony Autie, Panda Mery and Janine both on 24th July 2019. You can watch the videos in english.

En quatres conférences, le CLE et ses adhérent.es ont traduit pour résumer les interventions en deux parties :

Partie 1 : Politiques du stimming et fiertés autistes par Sarah Jane Harvey (Agony Autie), politiques socialistes de la neurodiversité du Labour par Janine Booth.

Partie 2 : Militantisme, Initiatives de personnes autistes aux Royaume-Uni par Panda Mery et situation française par CLE Autistes (Thibault).

Agony Autie : Politiques du corps et le stimming : la fierté autistique

Je m’appelle Sara Harvey.

Je ne parle pas français.

Je suis une militante autiste britannique. J’ai étudié les médias, la culture et le cinéma à l’université parce que je n’étais pas satisfaite des réponses de mes parents sur comment le monde fonctionne et où j’y ai ma place. Alors avec mon diplôme j’ai décidé de regarder l’autisme, comment il se raconte, l’idéologie de l’autisme et la culture et l’identité autiste.

J’ai été diagnostiquée à 27 ans. Je n’avais jamais pensé que j’étais autiste avant d’avoir 26 ans. Mais je savais que j’étais différente parce que les gens me disaient sans arrêt que j’étais bizarre et étrange. Et ce que j’ai appris, avec le mot “autisme”, c’est que c’est un mot très lourd. Lourd de stigmatisation, d’idéologie médicale, lourd d’identité personnelle. Pas étonnant qu’on soit une communauté avec des clivages entre nous. Alors je voulais parler de culture autiste, parce que je pense qu’avoir une culture, un espace où pratiquer notre identité, peut commencer à soulager certains de ces problèmes de clivage dans notre communauté.

La Fierté Autiste (Autistic Pride) au Royaume-Uni est l’endroit où les autistes examinent pourquoi iels sont fiers d’être différent·e·s. Je pense que si nous avons un espace pour se voir, pour être visiblement autistes entre nous, pour partager nos luttes, nos problèmes, les déficits vu par l’œil du modèle médical. Parce que sans communauté, si vous ne vous reconnaissez jamais en quiconque à part un problème de déficience, cela va continuer à faire stagner les droits civiques des autistes et leur bien-être.

[05:28] Alors pourquoi ces espaces autistes sont si enthousiasmants et révolutionnaires? Pour moi c’est la possibilité de stimmer, d’être vexé, d’avoir mal, d’avoir du mal à parler, et d’être un soutien plutôt que d’avoir un esprit de correction ou de discipline.

Je vais parler rapidement du stimming. Le stimming est un “comportement” d’auto-stimulation, je le fais là avec ça, tout ça c’est des stims. Et beaucoup d’autistes vont naturellement stimmer pour gérer l’anxiété, la douleur émotionnelle ou physique ou les soucis de leur environnement. Beaucoup de gens essaient d’arrêter le stim et deviennent mal à l’aise. L’idée de la Fierté Autiste, c’est d’être autiste, de se réguler de sa propre manière autiste, sans honte, et c’est très difficile. Parce que si je ne fais pas ça [stim], je vais peut-être faire ça [auto-mutilation]. Si je ne fais pas ça [autre stim], ça pourrait devenir ça [autre auto-mutilation]. Ça peut être dangereux: j’ai besoin de bouger. Et être avec d’autres autistes, qui bougent de la même manière que moi, c’est rafraîchissant pour l’identité: je ne vais pas me sentir cassée ou seule.

Et une partie de la Fierté Autiste, c’est de se réapproprier nos comportements, qu’on nous dit être cassés. C’est une politique du mouvement corporel. Pourquoi est-ce que ça [stim], c’est anormal? Alors que ça [danser] au son de la musique c’est normal? Alors certaines personnes autistes stimment en écoutant de la musique, c’est acceptable, tout d’un coup c’est beau, amusant et pas dérangeant. Mais je pense que c’est triste. Je pense que je devrais pas avoir à déguiser mes stims, ma régulation avec une chanson, pour calmer le confort des autres. Alors à la place je ressens une joie authentique, à exprimer mes tics, mes stims, mes battements de mains, tout ce que je ne suis pas censée faire. Et ça donne de l’espoir de le faire.

Alors les autistes au Royaume-Uni, on fait des danses de stims, des trains de stims. Parce qu’une partie de la culture autiste c’est d’avoir du courage et de faire un premier pas dans la visibilité, pour montrer que ce n’est pas une menace. Dans la Fierté Autiste on montre de la poésie, de l’expression orale, de la danse, des droits civiques, des discours, c’est vraiment beaucoup plus que ça.

On regarde l’identité, le bien-être dans le mouvement de la Fierté. Le bien-être de toutes les personnes autistes. Le mouvement de Fierté au Royaume-Uni est un mouvement pour les droits civiques qui grandit. Et quand on montre notre expression, notre danse, notre prose, notre art, nous militons pour les droits des plus vulnérables de cet espace.

Une partie du mouvement de Fierté c’est de se réapproprier les espaces publics qui nous sont donnés. N’attendez pas la permission d’être visible en public. Réappropriez-vous ces espaces, ces parcs, ces jardins, ces rues publiques. Réappropriez-vous cet espace et soyez visibles.

[14:30] Le mouvement de Fierté devient un mouvement des droits civiques et Louis Brunel, un autiste français, est un militant autiste qui fait de grands pas en France pour être visible et demander des comptes aux gens dont le discours fait ces dégâts. Louis s’est confronté à Andrew Wakefield, qui liait l’autisme et les vaccins, en disant que c’était la cause de l’autisme. Louis Brunel lui a fait face. Il s’est confronté à un homme dont la rhétorique à fait des dégâts pendant des décennies à des millions d’autistes parce qu’ils pensaient qu’ils étaient une conséquence, une pathologie tout juste sortie de terre.

On regarde le DSM-V, la chose qui dit aux autistes pourquoi ils sont autistes. Et on cherche à se réapproprier les choses qu’il qualifie d'”anormales” sur notre comportement et notre façon de penser. Le DSM-V a une phrase qui dit que “la perspective autiste sur le monde est anormale”. Les signaux d’alerte sont les réactions sensorielles à la lumière et au son. Ils disent que des choses comme faire “hmmmmm” sont anormales, dérangées, des troubles. Mais la communauté autiste, on veut que les médecins, les psychologues, la communauté médicale considèrent nos besoins dans leur entièreté, d’une façon holistique. Au lieu de dire “ceci est un comportement indésirable”, de dire qu’un enfant ou une personne n’est “pas assez disciplinée”, ou que quelqu’un “choisit d’être dérangé”. On vous demande de vous intéresser aux origines de nos problèmes: est-ce qu’on a mal? qu’on a un handicap physique? une difficulté d’apprentissage? est-ce qu’on est non-parlant? ou est-ce qu’on parle de la façon traditionnelle? est-on traumatisé? est-ce qu’on est isolé? quid de notre bien-être? Si vous ne vous intéressez pas à ces choses, et qu’à la place vous dites que c’est de la faute des autistes ou de leurs parents, vous bafouez les droits civiques de cette personne. Alors voilà, ça [mâchonner] c’est du stim, et c’est acceptable. Mais voilà les étiquettes qu’on me colle: “besoin d’attention”, “infantile”, “troubles”.

[22:53] Alors dans la communauté autiste, le mouvement de la Fierté, on s’intéresse à l’identité, aux droits civiques mais on veut aussi de réapproprier l’identité autiste pour se sentir fièr·e·s dans notre peau au lieu d’avoir honte ou peur.

Alors à Chester, là d’où je viens au Royaume-Uni, j’ai fait ma première Fierté Autiste dans un parc! Il y avait 600 autistes, parents, thérapeutes des différents besoins qui sont venus dans cet espace.

Je vais lire un commentaire, j’ai un commentaire d’un spectateur [sur Facebook]: “pour moi voilà pourquoi c’est si important qu’il y ait un mouvement de la Fierté Autiste et de l’identité. Mon fils a abandonné son identité autiste à cause de la façon dont on le traitait dès qu’on découvrait qu’il était autiste”. L’autre jour un garçon de 17 ans s’est suicidé en disant que c’était parce qu’il était autiste et qu’il ne supportait plus de vivre dans ce monde. Les plus grands facteurs de mortalité chez les autistes britanniques sont l’épilepsie et le suicide. Et je sais que dans les deux cas on peut l’empêcher. Je refuse de continuer à me cacher parce que ça nous coûte nos vies.

[27:12] Et je veux reprendre les parcs. La Fierté Autiste reprend les parcs, et un jour ce sera la rue. Je rêve de la rue, d’une rue autiste, avec une boutique qui a un espace de repos sensoriel. Des stims physiques, des ateliers d’expression. Des coins de bien-être, de conseils, gérés par des autistes pour les autistes. Et de la science bien sûr. Plein de petits stands de science pour être créatifs, et de l’art.

Alors oui une rue entière, comme le mouvement LGBt a repris la rue, iels refusent de se cacher, d’être médicalisé·e·s, avec leur propre humanité. Médicaliser une personne entière, pour son esprit, son cœur, son âme, pour sa façon de gérer, c’est superflu. Et ça a fait croire à plain d’autistes que c’est fondamentalement de leur faute. Mais ce comportement, que vous ressentez comme anormal, il est ancien. Il est ancien et je pense qu’il n’y a rien d’anormal dans le mouvement du corps, le toucher, la façon de gérer. J’essaie aussi de me réapproprier ma cognition, ma façon de penser, avec son côté répétitif, concentré, intense, passionné. Et je pense que ce n’est pas cassé, c’est difficile par moments, mais ce n’est pas cassé.

Je pense que ce qui fait le plus de mal à la communauté autiste en ce moment c’est le manque de moyens pour l’éducation, et le recrutement, l’emploi. Les troubles physiques rares, mais répandus dans la communauté, où il n’y a pas ou peu de recherche. L’éducation aux profils sensoriels: les lumières, les bus, les sons, le bruit, le contact, c’est ça qui est anormal, pas nous.

[33:35] Alors à mon avis, la culture autiste est excitante et prometteuse parce qu’on essaie d’être réaliste sur les défis qu’on doit relever. On cherche une amitié de pair à pair. Voir des autistes comme soi, militer pour les autistes les plus vulnérables de la communauté, ceux qui n’ont pas voix au chapitre, ou qui ne peuvent accéder à ces espaces aujourd’hui. Parce que je pense qu’un jour, les personnes autistes, leurs parents, leurs familles, la stigmatisation qu’iels rencontrent parce qu’iels sont différents par leur esprit, leur comportement, leur capacité d’apprentissage, quand nous raconterons notre propre histoire, et qu’on expliquera pourquoi on fait ce qu’on fait, ça permettra de réparer des décennies de stigmatisation et d’idéologie qui ont été posées sur cette communauté au lieu de s’intéresser à nos droits humains. Mettre la faute sur le comportement autistique n’est jamais la bonne façon de faire.

Je sais que ça peut être effrayant d’être différent, mais s’il vous plaît, je vous implore de trouver, de graviter autour des personnes dans lesquelles vous vous reconnaissez. Je vais bientôt finir. Mais concrètement, j’ai un fils de 7 ans. Il communique différemment, et pour moi c’est comme une langue différente. Et comme Janine, je fais ça pour les générations futures. Parce qu’à 7 ans, mon fils pense déjà qu’il n’a pas sa place dans ce monde. Ça ne va pas! Alors je choisis, oui je dois choisir la fierté malgré la honte qu’on peut avoir d’être différent.

Juste une chose… sur le stimming, le signal d’alerte pour le diagnostic, faire tourner des choses, pivoter. Au lieu de se dire “stop! stop!”, allez-y. Laissez-vous porter par le courant. Et avant même de le savoir: regardez, j’ai une roue! J’ai les principes fondamentaux de la physique: le mouvement, la décélération, la pression, la gravité. J’explore avec mes sens, mes doigts, mes yeux et c’est fantastique, et on l’a fait depuis la nuit des temps. Il n’y a rien d’anormal, il n’y a pas à s’excuser, et on est pas nés de la dernière pluie.

Merci d’avoir écoutée et s’il vous plaît, vraiment, au fur et à mesure que vous prenez des forces, souvenez-vous des plus vulnérables et invisibles des autistes.

Merci beaucoup.

Exemple d’aménagements pour un colloque : sur une table il y a deux casques en libre service, des étiquettes de communication rouge (ne pas intérargir) et verte (vous pouvez intérargir), ainsi qu’un plan pour savoir où manger.

Questions :

Le public a souligné qu’en France, le stimming en public pouvait être dangereux car l’autisme est stigmatisé et peut être psychiatrisé (et idem pour les personnes autistes racisées en Royaume Uni aussi) . Agony Autie reconnait que cela est privilégié et souligne qu’il y a encore 3000 personnes autistes dans les hôpitaux psychiatriques anglais .

Une autre question parle du cliché des Aspergers et leur “super pouvoirs” comme autre forme de stigmatisation dans le sens positif. Agony Autie fait remarquer qu’au Royaume-Uni il y a un peu d’informations et on normalise surtout la présence de personnes autistes avec des espaces aménagés.

https://www.facebook.com/agonyautie/videos/433102237284823/
Regarder l’intervention en anglais. Watch Agony Autie in english.

Janine Booth : les politiques socialistes de la neurodiversité, l’exemple du manifeste de la neurodiversité du Labour Party

Note du traducteur : le terme “impairment” est traduit par “empêchement”, tandis que “disability” est traduit par “handicap”

(Sara est beaucoup plus calée en technique que moi)

(Est-ce que je commence maintenant?)

Bonjour, je m’appelle Janine Booth, j’habite à Londres.

Qu’est-ce que je peux dire sur moi? J’ai 53 ans, je me suis rendue compte que j’étais autiste à 45 ans, après avoir appris sur le sujet en ayant à ce moment-là un enfant autiste. Et je suis socialiste et syndicaliste. Et parce que je suis syndicaliste, quand j’ai découvert que j’étais autiste je me suis mise à former les représentants syndicaux sur l’autisme et ensuite plus largement sur la neurodiversité. Et dans les dernières années j’ai littéralement formé des centaines de représentants syndicaux pour se battre pour des lieux de travail plus adaptés à l’autisme et à la neurodiversité.

(Je suis aussi très ménopausée donc j’ai du mal avec cette chaleur)

Mais certains des changements dont nous avons besoin dans la société doivent venir du niveau du gouvernement, de la politique publique. Alors en tant que membre du Parti travailliste (Labour), j’ai travaillé avec d’autres membres du Parti travailliste, autistes ou neurodivergents, avec le soutien de John McDonnell, qui est ministre fantôme (d’opposition) des Finances, pour développer un Manifeste de l’autisme et de la neurodiversité : https://neurodiversitymanifesto.com/

Tract du manifeste de la neurodiversité pour le Labour, à lire sur : https://neurodiversitymanifesto.com/

Je pense que j’ai donné un de ces tracts à la plupart d’entre vous, qui en dit un peu plus sur le Manifeste. Vous pouvez consulter le document complet en ligne. Ce que je vais faire maintenant c’est vous guider et expliquer les principes clé et les principales propositions du Manifeste.

[05:02] Il est basé sur 5 principes fondamentaux. Le premier est le modèle social du handicap. Dans le cadre du modèle vieillot, médical du handicap, on verrait l’autisme comme quelque chose qui ne va pas chez vous, et vos problèmes comme venant de ce truc autiste qui ne va pas chez vous. Tandis que, dans le modèle social, on dirait que l’autisme est votre condition, votre neurotype, et cela peut ou non être un empêchement. Chez des personnes différentes, l’autisme est différent.

Et le handicap, c’est les barrières que la société met en travers de la route de quelqu’un qui a une affection ou un empêchement. Les personnes autistes sont handicapées, mais sont handicapées par la société, et pas nécessairement par notre autisme. Et même lorsque c’est par notre autisme, c’est par notre autisme combiné à l’environnement dans lequel nous sommes.

Notre deuxième principe fondamental est l’approche de la neurodiversité, qui est l’acceptation du fait que l’espèce humaine est neurologiquement diverse, qu’elle comporte des individus avec des câblages du cerveau différents, des structures cérébrales différentes. Les neurologies minoritaires incluent l’autisme, mais aussi la dyslexie, la dyspraxie et diverses autres affections. Mais comme on parle d’autisme aujourd’hui, j’expliquerai le Manifeste en termes d’autisme.

Le troisième principe fondamental est l’opposition à l’austérité. Depuis la crise économique qui a commencé il y a 11 ans, les gouvernements on fait payer la classe ouvrière pour le bazar laissé par le système capitaliste. Et ces coupes budgétaires ont eu impact disproportionné sur celles et ceux qui étaient déjà dans le besoin. Par exemple au Royaume-Uni, on est maintenant dans un état de crise avec un manque total de financement pour les besoins spécifiques dans l’éducation des personnes handicapées. Ce qui veut dire que les enfants autistes sont en train de perdre le peu de soutien dont ils disposaient avant.

Un quatrième principe fondamental est: socialisme, démocratie et solidarité (oui, ça fait 3 principes). Notre Manifeste n’est pas un manifeste pour n’importe quel parti politique, c’est totalement un manifeste socialiste, de gauche, pour le parti travailliste.

[11:13] Et le cinquième principe fondamental est “Rien sur nous sans nous”. C’est depuis de nombreuses années un slogan important dans le mouvement des personnes handicapées. Et les personnes autistes, on voit qu’on dit un sacré tas de choses sur nous, mais que quand il s’agit d’écouter les personnes autistes, il se passe beaucoup moins de choses.

Donc voilà les cinq principes fondamentaux du Manifeste. Le Manifeste ensuite parle de la situation à laquelle font face les personnes autistes et neurodivergentes dans la société actuelle.

Il manque 9 minutes de vidéo, cela peut être illustré par le film “Moi Daniel Blake” où des consultants privés assurent le contrôle du chômage et des aides sociales :
[Dans la partie qui manque, Janine explique les différentes propositions du
manifeste, notamment la discrimination, légale, qui peut exister dans le
volontariat dans des associations non lucratives, ou les conséquences désastreuses de l’Évaluation des Capacités de Travail dans le système de
chômage britannique, qu’elle veut remplacer par une évaluations des
employeurs et de l’accessibilité de leurs postes aux personnes autistes]

Notre Manifeste propose de revoir le système judiciaire pour devenir plus accessible et plus juste, pour les personnes autistes qui se retrouvent dans ce système, que ce soit pour un crime ou toute situation dans laquelle iels se seraient retrouvé·e·s.

Et notre Manifeste renforcera la loi de plusieurs autres façons. En Grande-Bretagne, la loi sur l’égalité est structurée de sorte qu’il est illégal de discriminer qui que ce soit sur la base d’un ou plusieurs de 9 critères de protection, que sont le sexe, l’origine ethnique, le handicap, etc. Mais une partie du problème pour les personnes autistes est qu’on ne rentre pas forcément dans la définition du handicap selon cette loi, parce que cette définition est basée sur le modèle médical. Donc notre Manifeste propose de faire de la condition neurologique un critère protecteur avec les mêmes droits et les mêmes protections juridiques que le handicap.

Et il y a plein d’autres propositions dans notre Manifeste.

[03:12] Alors pour résumer, on parle beaucoup de notre expérience de la discrimination, des désavantages, de l’expérience autiste dans une société hostile, et cette discussion est très importante. Mais c’est aussi important d’identifier des propositions spécifiques, concrètes qu’on attend du gouvernement pour améliorer nos vies.

Et c’est ce qu’on essaie de faire avec ce Manifeste, il a été élaboré par une équipe d’environ 20 personnes neurodivergentes, avec des affections neurodivergentes diverses, des idées différentes, des origines ethniques différentes, de différentes régions du Royaume-Uni. Et on a également consulté très largement autour du mouvement travailliste, du mouvement syndical, et parmi les personnes autistes et neurodivergentes, dont beaucoup ont apporté leur contribution à ce que dit le Manifeste.

Maintenant, ce qu’il faut c’est se battre pour le mettre en application, ce qui veut dire, d’abord élire un gouvernement travailliste, et ensuite, élire un gouvernement travailliste qui s’engage à appliquer ces propositions. Nous avons le soutien de la direction du parti travailliste et de beaucoup de sections locales de la base du Parti travailliste.

Mais pour qu’on puisse continuer à s’organiser pour ça, pour s’organiser pour le développer, et pour lutter contre la discrimination, pour attirer plus d’autistes et autres personnes neurodivergentes dans l’activité politique du mouvement travailliste, on est en train de créer une nouvelle organisation, le “Labour neurodivergent”, qui rassemblera les membres du Parti travailliste qui sont autiste, dyslexiques, dyspraxiques ou autres neurodivergents et renforcera la lutte pour l’émancipation et le socialisme.

Merci.

Première partie de la vidéo . Watch Janine Booth, first part of her talk.

Questions :

[08:10]

J’ai deux ou trois questions et remarques: les partis politiques français sont assez en retard dans l’intégration du principe “Rien sur nous sans nous”, on peut trouver des sujets dans lesquels c’est le cas, comme le féminisme ou peut-être les questions LGBT, mais la neurodiversité est essentiellement absente des partis politiques de gauche en France.

Et assez souvent ils traiteront le sujet sous l’angle du modèle médical, par exemple une conséquence est que quand la France applique l’austérité aux écoles et au système médical comme c’est le cas en Grande-Bretagne, la conséquence habituelle est que les parents, au lieu de vouloir une meilleure adaptation dans les écoles vont chercher une place pour leur enfant dans une institution médicale, parce qu’on a des classes surchargées etc.

Une autre question que j’ai, c’est: est-ce que vous avez une sorte de Manifeste pour la place de la neurodiversité dans les organisations militantes? Dans les partis politiques, les syndicats, etc. En France il y a quelques partis politiques de gauche, l’un d’eux a un petit groupe sur la neurodiversité mais la plupart n’ont rien ou n’ont pas atteint la masse critique pour l’avoir. Est-ce que vous avez un peu de recul sur la façon de faire dans les partis politiques?

[11:15]

Ok, je vais répondre à l’envers.

Rendre le Parti plus accessible, une sorte de Manifeste interne, si on veut, ne fait pas partie de ce Manifeste, mais c’est quelque chose sur lequel le “Labour neurodivergent” travaillera. On veut arriver à une situation dans laquelle par exemple, les organisations du Parti travailliste produiront toutes leurs publications avec des polices de caractères adaptées à la dyslexie, où chaque conférence, ou autre événement aura une salle de repos, où le stimming est accepté dans les réunions, et surtout que plus personne ne soit brimé ou exclu parce qu’iel est bizarre ou différent.

La question précédente était sur les écoles et les parents qui veulent mettre les enfants autistes dans les institutions médicales plutôt qu’à l’école. Alors voilà: si l’école n’est pas adaptée à un enfant autiste, le modèle médical vous dira que quelque chose ne va pas chez votre enfant autiste. Le modèle social nous dit que quelque chose ne va pas dans l’école. Donc grâce aux propositions faites dans le Manifeste, les écoles deviendraient plus accessibles, avec des classes plus petites, moins de surcharge sensorielle, des méthodes pédagogiques différentes etc. Et devinez quoi? Ça rendra les écoles plus agréables pour tous les enfants et pas juste pour les enfants autistes.

[14:49] Et la première partie de la question était à propos des partis politiques et de l’adoption du principe “Rien sur nous sans nous”. Honnêtement je ne peux pas, et ne veux pas parler du Parti conservateur ou des Partis libéraux ou les partis comme ça, je parlerai uniquement du Parti travailliste. Et je pense que le mouvement travailliste doit apprendre de sa propre histoire. Le Parti travailliste en Grande-Bretagne a été fondé, il y a à peine plus de 100 ans, parce que les militants de la classe ouvrière ont réalisé que le choix entre Conservateurs et Libéraux était un non-choix. Il a été fondé sur le principe de l’indépendance de la représentation de la classe ouvrière, que la classe ouvrière doit être représentée par elle-même et non demander à quelqu’un de le faire à notre place. On peut appliquer ce même principe à des segments dans la classe ouvrière, qu’il s’agisse des minorités Noires et ethniques […]

https://www.facebook.com/agonyautie/videos/695567677623136/?fref=gs&dti=848811301967715&hc_location=group
Deuxième partie de l’intervention de Janine Booth. Watch in english Janine Booth and her talk.

Conclusion de la partie 1 par CLE Autistes :

Grâce à Sarah Jane Harvey, on voit que les politiques de l’autisme sont comparables aux autres minorités : des (bio)politiques du corps dirigent nos existences pour nous définir et nous contrôler. L’expertise médicale grâce à son autorité et son pouvoir de classification, décide de nos représentations et de notre identification. Des critères peuvent être décidés et chaque critère est bon ou mauvais ce qui permet de dire ce qui doit être corrigé ou développé. Ce contrôle permet de nous rendre productifs au service du système économique. Mais en réponse à ce contrôle du corps, les personnes autistes peuvent agir et reprendre aux experts, le savoir sur leur propre existence. Une résistance et une réappropriation de son identité autiste est possible. Géographiquement, les personnes autistes peuvent résister et se réapproprier l’espace qu’on leur refuse. Nous devons concevoir des espaces de résistance où nous pouvons remodeler et se réapproprier les représentations qu’on fait de nous mêmes.

Avec Janine Booth, si on parle politique institutionnelle, on voit d’emblée qu’il ne peut avoir de consensus sur ce que devrait être une politique de l’autisme. Il ne peut en avoir parce ces politiques sont intiment liées aux politiques économiques et sociales d’un pays donné, concernant toute la population et la touchant en fonction de différents privilèges (classe, genre, race, handicap…) . Un rappel rafraichissant à l’heure où en France on nous dit qu’on devrait rattraper un retard en se rangeant tous et toutes derrière une seule politique, comme si cette politique était neutre et consensuelle. Il n’en est rien et plusieurs voies et projets de société peuvent être choisis. Nous avons pu écouter une présentation de projet de neurodiversité socialiste et des solutions inspirantes en matière d’égalité des droits et de participation à la société ont été données.

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