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L’autisme n’est pas “comportemental”

  • Temps de lecture :5 min de lecture

Par Cal Montgomery, traduction par Méta et le Pôle Contributions, article original sur le site Thinking Autism Guide

[Description de l’image : chat européen au poil orangé avec des nuances de couleur. Il est posé sur une dalle de jardin. Il fait une grimace comme s’il fronçait les sourcils]. Flickr

L’autisme n’est pas comportemental. L’autisme ne consiste pas en un comportement atypique. Un comportement atypique est une conséquence de l’autisme. C’est un lot de manifestations extérieures grâce auxquelles ce qui se passe à l’intérieur peut être suspecté, diagnostiqué, et investigué. Mais changer le comportement ne change pas l’autisme.

Tout ce que l’on reconnaît, on le reconnaît à ses manifestations extérieures. La peur, par exemple, peut ressembler à une sueur froide, une respiration haletante, et des pupilles dilatées, mais ce n’est pas la peur en elle-même.

La méthode ABA (Applied Behavior Analysis), qui représente le plus populaire monopole en matière d’interaction avec les autistes, nie l’existence d’un “intérieur”. Elle professe que seules comptent les manifestations extérieures. C’est profondément déshumanisant. C’est aussi une vision des choses qui est presque impossible à maintenir.

Quand vous qualifiez l’autisme de trouble du comportement – et je ne vais pas parler de toute la partie “trouble” maintenant même si je ne l’accepte pas non plus – vous prêtez uniquement attention à la partie de la personne que vous pouvez voir, à travers votre propre paradigme neuroculturel. Vous niez l’existence de quelque chose de plus profond.

Est-ce que vous aimeriez être traités de la même façon par autrui ?

Quand vous dites que le comportement autiste n’a que quatre fonctions, vous niez le fait que les personnes autistes peuvent s’émouvoir, que nous espérons et que nous ressentons de la répulsion, que nous nous battons pour agir correctement malgré nos intérêts personnels, que nous tremblons de terreur et que nous avons nos aspirations. Que nous sommes humains. Imaginez n’importe lequel des grands poètes revisité de manière à remplacer les émotions profondes et la condition humaine par des demandes d’attention et des caprices.

Est-ce que vous accepteriez ceci pour vous-mêmes ?

“Ils ne ressentent pas ces choses-là comme nous” est une négation de l’humanité des autistes.

Au cœur des relations allistes*/autistes, du moins là où je vis, existe un refus de prendre l’humanité des autistes sérieusement, d’accepter que nous sommes des personnes dotées de vraies perspectives et de vrais savoirs – peu importe nos handicaps – qui méritent d’être pris au sérieux et traités de façon respectueuse. Ces perspectives ne sont pas forcément à la portée de tout le monde, et pourtant elles existent. À la place, des suppositions aisées et fréquemment contradictoires sont tirées à partir du présupposé que le cœur d’humanité est limité ou manquant, et que les perspectives autistes sont vues comme déficientes par nature, si seulement elles existent.

La croyance qu’une riche individualité est incompatible avec un handicap important, en particulier un handicap intellectuel, est à l’origine de cette division, au point que l’individualité ne peut être reconnue que chez ceux qui sont valides ; et un handicap est traité comme étant fondamentalement déshumanisant. Ça ne l’est pas. L’existence simultanée d’un handicap profond et d’une individualité profonde se retrouve partout.

Tous types d’horreurs sont projetés sur notre image déshumanisée, et nous devenons quelque chose à contrôler plutôt qu’une personne à qui ouvrir le champ des possibles. Nous retournons donc à la méthode ABA, une technologie de contrôle qui altère les comportements tout en ignorant ce qui les détermine.

Des enfants ne deviennent pas plus humains parce qu’ils deviennent plus normaux aux yeux de ceux qui nient leur humanité. Copier la culture majoritaire ne fait pas disparaître le statut de minorité. Ça ne fait que les rendre plus tolérables pour ceux qui détiennent du pouvoir sur leurs vies.

Est-ce que “être tolérable” serait le but que vous choisiriez de vous fixer ?

Voilà ce que vous faites quand vous dites que l’autisme est comportemental. Vous participez à un mouvement qui nie l’individualité des autistes.

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*”Alliste” veut dire “qui n’est pas autiste”

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