L’Association CLE Autistes a fait une contribution à la réflexion pour le grand débat National de l’Espace Éthique Ile-de France sur les droits et la citoyenneté des personnes handicapées
L’association CLE Autistes était présente lors des ateliers du jeudi 14 mars 2019 pour débattre de la citoyenneté des personnes en situation de handicap ou de maladies à l’espace éthique de la région Ile de France.
Elle a souligné lors de l’atelier sur les injustices, et les discriminations, l’importance des représentations et du problème structurel des discriminations envers les personnes handicapées. Il faut passer, à présent, du modèle médical du handicap au modèle social du handicap où les personnes handicapées sont considérées comme sujet de droit et non comme objets de soin. Cela passe par le changement des représentations culturelles et sociales en montrant que le handicap est construit par les barrières que met la société à une diversité fonctionnelle, mentale et neurologique. L’importance des médias, de la culture (films, livres) est primordial en encourageant la participation des personnes handicapées aux métiers d’acteurs et en leur donnant la parole pour sensibiliser la société. La présence des enfants handicapés à l’école est indispensable pour que l’acceptation de la diversité se fasse, c’est donc toute la société qu’il faut transformer.
Sur l’expertise et le pouvoir d’agir, cette prise de conscience et le changement des représentations ne peut s’effectuer qu’en laissant la parole aux personnes concernées directement par le handicap : c’est l’auto-représentation. Les personnes handicapées sont expertes de leur vie et de leurs besoins, ces avis doivent être écoutés par les médecins ou les familles dans la complémentarité de leur expertise propre.
CLE Autistes considère que toutes les personnes concernées peuvent s’exprimer même si ce n’est pas langagier ou oral, il existe des moyens de communication alternatifs et augmentés qui sont quasiment inconnus en France, peu développés et inaccessibles. Tous les moyens doivent être mis en oeuvre pour aller chercher l’expertise et ne pas supposer les capacités sur le pouvoir d’agir de la personne.
Enfin, si la restitution du débat comporte des propositions ambitieuses et permettant de transformer durablement la société, il est dommage que l’ateliers portant sur les droits n’ait à aucun moment parler de l’application de la Convention de l’ONU sur les droits des personnes handicapées ou du socle européen.
Le rapport sur l’état des droits des personnes handicapées en France ainsi que le rapport sur la privation de liberté de la rapporteuse de l’ONU parus dernièrement sont pourtant sans ambiguïtés [1][2]: il n’y a pas de droits possibles sans politiques de désinstitutionnalisation et de transformation progressive des établissements médico-sociaux en services de proximité et d’aide humaine, technique, médicale, éducative et financière. Le principe même des institutions viole les droits fondamentaux car elles imposent un mode de vie donné dans un système qui pour le moment n’offre aucun libre choix.
La détention dans des établissements spécialisés est antinomique avec la notion de droits fondamentaux et plutôt que de parler de la sexualité comme sujet “tabou”, pour nous il aurait fallu plutôt parler du tabou des institutions. Nous nous sommes étonnés que soit cité comme amélioration possible des droits des personnes handicapées en établissement spécialisé le fait d’avoir un lieu intime pour la sexualité alors qu’une vie de couple ne peut se résumer à un lieu occasionnel. En réalité, entre l’avis négatif des parents et celui positif des éducateurs, la sexualité des personnes handicapées est toujours contrôlée en institutions et il n’y a pas non plus de ce côté là de liberté et de droits possibles sans désinstitutionnalisation.
Pour CLE autistes, il est donc nécessaire d’appliquer cette convention en donnant un droit à l’assistance personnelle individualisée pour permettre de vivre sa propre vie comment on l’entend sans l’avis de l’expertise médicale.
En conclusion, il est dommage de parler de diversité et d’accessibilité sans remettre en question ce qui les empêche d’advenir.
Contribution de la direction collégiale de l’association Collectif pour la liberté d’expression des Autistes
Retrouvez les propositions établies lors de cette consultation.
[1] Rapport ONU 2019 sur la France : https://informations.handicap.fr/a-rapport-onu-handicap-france-grade-11625.php/true
[2] Rapport sur les privations de liberté, Analyse de CLE Autistes : https://cle-autistes.fr/privations-de-liberte-lonu-fustige-linstitutionnalisation/