Description de l’image : photo de Ed Roberts – Leader et activiste pour le mouvement des droits du handicap et fondateur de mouvement pour la vie autonome. On le voit avec un panneau ” Droits civiques pour les handicapés”

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L’ENIL est le réseau européen pour la vie autonome, il défend et a défini la vie autonome et les services associés de façon précise lors de son assemblée générale en 2012.

La notion de vie autonome (Independent Living)[1] est présente dans le droit depuis la convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CRPD/CDPH) dans l’article 19. L’article 19 affirme le droit des personnes handicapées de choisir librement leurs conditions de vie (où, comment, avec qui) pour faire leurs propres choix (auto-détermination). L’autonomie est une construction sociale, la dépendance des personnes valides (du travail d’autres personnes, du système économique) est rendue invisible pour les personnes valides via des tâches valorisées, alors que les personnes handicapées ne sont pas valorisées et sont considérées comme dépendantes. C’est le privilège valide

Tout le monde est interdépendant selon cette perspective. La vie autonome n’est donc pas forcément vivre seul, mais concerne surtout la liberté d’une personne de choisir et de contrôler sa vie et son mode de vie.

Un droit humain

La vie autonome repose sur une politique du handicap fondée sur les droits humains. La vie autonome se construit par l’accès en obtenant à des moyens financiers, environnementaux et matériels permettant de gérer sa propre vie.

-Pouvoir choisir son lieu de résidence pour décider avec qui et comment vivre.

-Les services (éducation, logement, santé, loisirs, administration, etc) et les transports doivent être accessibles sur la base de l’égalité des chances.

-Un soutien technique, une assistance personnelle et des services communautaires doivent être disponibles pour couvrir les besoins des personnes handicapées.

-La vie autonome est pour toutes les personnes handicapées quel que soit le niveau de soutien requis.

Assistance personnelle

L’assistance personnelle est un instrument de la vie autonome. L’assistance personnelle est l’allocation d’argent destinée aux personnes handicapées, dont le but est de payer pour toute assistance nécessaire.

-L’assistance personnelle doit être allouée sur la base d’une évaluation des besoins individuels, en fonction de la situation de chaque individu et en cohérence avec le marché du travail national.

-Les personnes handicapées doivent avoir le droit de recruter et de gérer leurs assistants selon le mode d’emploi voulu.

-Les allocations d’assistance personnelle doivent couvrir tous les frais en plus des salaires des assistants personnels : cotisations patronales, coût administration et soutien par les pairs.

Désinstitutionnalisation

La désinstitutionnalisation est un processus politique et social qui prévoit le passage de la prise en charge dans une institution ou d’autres lieux isolés et séparés vers la vie autonome en milieu ordinaire.

La désinstitutionnalisation n’est efficace que si le soutien fourni pour contrôler sa vie est suffisant. Elle repose sur trois points importants :

-L’accessibilité des logements, transports et services (éducation, travail, santé, commerces, administration, loisirs…).

-La mise en place de l’assistance personnelle

-Le soutien par les pairs handicapés pour maintenir un lien social, éviter l’isolement des adultes et pour éviter un placement futur en institution des enfants.

Services communautaires

Le développement de ces services communautaires (ou services spécialisés intégrés dans la collectivité) exige une approche politique globale et sociale d’accessibilité dans tous les domaines et lieux de la société. Ce terme veut dire l’accession aux mêmes services que les personnes non handicapées pour vivre en tant que citoyens égaux.

Un réseau de services communautaires rend inutiles les services parallèles, tels que les institutions, écoles et classes spécialisées, hôpitaux de long séjour, services de transport adapté, emplois protégés, etc.

Les foyers collectifs (Foyers de vie et Foyers d’accueil médicalisé)  ne sont pas des services communautaires et ne constituent pas une situation de vie autonome. S’ils existent, il faut que les financements en services communautaires et en assistance personnelle soient fournis à égalité.

Cas de la France

La loi de 1975, puis la loi de 2005 ont posé le principe du droit à la vie autonome (allocation mensuelle pour accéder à une aide appropriée), l’assistance personnelle prend la forme de la Prestation de Compensation du handicap- Aide humaine (PCH). Mais elle a peu à voir avec ce qui existe dans d’autres pays européens : : 

-Elle n’est pas pilotée par les usagers. Elle a une grille d’évaluation très restrictive pilotée par les médecins et l’administration.

-Elle n’est pas accessible pour les besoins permanents et complexes : 3h d’aide et 6h pour les besoins du quotidien pour les personnes autistes non-parlantes et/ou avec handicap intellectuel /polyhandicapés.

-Les besoins du quotidien sont en fait limités : la PCH ne finance pas l’aide à la cuisine, aux tâches ménagères ou aux courses. La PCH inclut 1h d’aide pour des  activités sociales, au final seuls les besoins en hygiène/ soin personnel (douche, toilettes) sont fournis. Les services de “nursing” nécessitent d’autres financements et prestations fournies par les communes ou la sécurité sociale, ce qui est compliqué à gérer pour les personnes handicapées.

-Elle n’existe pas pour les enfants : les parents doivent choisir entre l’allocation de compensation du handicap et les PCH. 

-Il y a des distinctions suivant l’âge (avant et après 65 ans).

– Les personnes handicapées qui travaillent ont moins de droits à la PCH (156h/an + aménagements poste de travail).

Adapté et republié via le site de l’ENIL. En savoir plus :

https://enil.eu/wp-content/uploads/2016/09/7.-PA-table_France.pdf?fbclid=IwAR1yPHCm_iqW_rwvi4OH-pHEuIRzQ8WyhWAR6ZR-lu8kAViGQq13p5shNn4

Pour une refondation de la PCH en assistance personnelle, propositions de Coordination Handicap et Autonomie :  http://coordination-handicap-autonomie.com/images/documents/Contribution_CHA_sur_PCH.2019_03_07.pdf 

Cas pratique : JAG coopérative suédoise

JAG est une coopérative suédoise gérée par les usagers polyhandicapés ou ayant des handicaps intellectuels.

Les décisions se font de façon démocratique et via un processus de médiation collective, le non-verbal, l’interprétation des comportements et du regard sont pris en compte. Il y a plusieurs interprétations possibles, mais aucune décision n’est prise si elle va à l’encontre des droits de la personne concernée. On évalue en permanence son bien-être et ses réactions.

Il est important de préciser que la formation n’est pas spécialisée ni professionnelle contrairement aux revendications de nombreuses associations sur l’autisme ou le handicap. Elle est individualisée et adaptée à chaque personne handicapée via une médiation personnalisée. Les assistants personnels sont choisis par la personne concernée par ce processus. C’est le modèle social du handicap.

Vidéo sous titrée en français présentant JAG la coopérative suédoise pour les droits civiques des personnes polyhandicapées.


[1] La notion de vie autonome provient du mouvement communautaire « Independent Living » qui a commencé dans les années 1960 à Berkeley en Californie.