Une liste de choses à vérifier afin d’identifier les sources d’agressivité

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Traduction bénévole par le Pôle Contributions du blog We are Like your child et adapté avec conseils en plus.

5 manières de réduire l'agressivité d'un enfant autiste
Dessin d’un enfant sur un fond bleu ciel qui commence à exploser devant un adulte.

L’une des inquiétudes parentales les plus fréquentes et dures que l’on voit dans la communauté autistique c’est celle du comportement agressif de l’enfant ou de l’adolescent. Les parents bienveillants sont souvent frustrés de ne pas être capable de discerner la source de la détresse de leur enfant ou s’inquiètent de ne plus arriver à gérer l’explosion physique de leur jeune enfant quand il sera plus âgé et plus grand.

Plusieurs d’entre nous, à We Are Like Your Child, sont concernés personnellement par ces questions de colère et d’agressivité ou connaissent des enfants qui le sont.

Ce qui suit est une liste de question à utiliser quand on essaye d’identifier la source de l’agressivité ou de l’alléger que ce soit pour une personne autiste adulte ou enfant. Elle n’est pas exhaustive mais c’est une liste préliminaire, à partir de nos expériences personnelles, des problèmes principaux qui peuvent mener à un comportement qui peut être perçu comme de l’agression de la part de la personne autiste. (On peut, jusqu’à un certain point, ramener beaucoup de ces problématiques à de l’automutilation).

Ces problématiques ne sont présentées dans ordre rigide ni de probabilité ni d’importance – tous sont des facteurs importants à prendre en compte et sur lesquelles enquêter, et ils peuvent influencer différents individus de façon différentes et dans des combinaisons très différentes.

Checklist

1. Vérifiez qu’il ne soit maltraité d’aucune façon que ce soit à la maison, à l’école, en thérapie ou dans d’autres activités, que ce soit par ses parents, ses professeurs, ses camarades, ses frères et sœurs (notamment ce qui peut avoir l’air de moqueries et provocations normales) et que ce soit physiquement, émotionnellement, sexuellement ou psychologiquement.

1a. S’il est le sujet d’une thérapie dont le but est de normaliser son apparence, comportement ou ses manières, d’éliminer le fait qu’il stimme, de le rendre normal et indistinguable des autres : c’est un situation d’abus.

1b. Est-ce que les professeurs de son école utilisent des punitions groupées en réaction à des fautes individuelles ? Si oui, l’enfant peut se dire qu’il n’y a aucun intérêt à bien se tenir et à ne pas être violent, puisqu’il sera de toute façon puni pour quelque chose qu’il n’a pas fait. Une anxiété extrême peut être le résultat de ne pas savoir ce qui est la bonne chose à faire puisque la punition semble aléatoire.

2. Est-ce qu’ils ont accès à un mode de communication fiable et sécurisant ? Si non, qu’est-ce qui a été mis en place pour résoudre cela ?

2a. Est-ce que réussir à parler est placé en priorité, au-dessus du développement d’un mode de communication qui marche mieux pour lui ?

3. Est-ce que ce qu’il communique, peu importe sa forme, est reconnu comme tel et donné de la valeur ? Est-ce qu’on prend sérieusement ce qu’il dit, peu importe la façon avec laquelle il arrive à le dire ? Est-ce qu’il arrive à faire en sorte que l’on réponde à ses besoins en utilisant une méthode non-agressive ?

4. Est-ce qu’on présume de ses capacités ? Est-ce que l’on respecte complètement son autonomie et son droit à décider pour lui-même ? Est-ce que son droit à l’autonomie de mouvement et à un espace personnel est bafoué ? Est-ce qu’il est forcé, poussé, manipulé à faire des activités ou à utiliser certains modes de sociabilisations auxquels il n’est pas prêt ? Est-ce qu’il est mis dans des situations où il ne se sent ni supporté ni en sécurité ? Est-ce qu’on l’autorise à travailler scolairement à un niveau qui est en accord avec ses capacités ? Est-ce que ses forces sont reconnues et encouragées ? Est-ce qu’on lui fait confiance pour connaître et faire valoir ses propres limites ? Est-il inclus au maximum dans l’organisation de son bien-être, de son éducation et de ses activités ?

5. Est-ce que quelque chose cloche dans son environnement sensoriel, que ce soit à la maison ou à l’école ? Est-ce que sa maison ou sa classe est un environnement trop bruyant, chaotique, claustrophobique ou imprévisible ? Est-ce qu’il est bloqué dans un environnement avec d’autres enfants qu’il trouve hostiles, menaçants, durs à gérer ?

5a. S’il est à la recherche de stimuli sensoriels intenses d’une façon ou d’une autre (souvenez-vous que quelqu’un peut essayer de se protéger de stimuli sensoriels pour certaines choses et les rechercher dans d’autres situations), est-ce qu’il a un endroit pour se concentrer et recevoir de stimuli physiques intenses comme les arts martiaux, le sport, la randonnée, la nage ou l’équitation ?

6. Est-ce qu’il a le droit de dire « non » et que cela compte ? Ce qui ne veut pas dire qu’il n’est jamais obligé de faire quelque chose qu’il n’a pas envie de faire (comme aller chez le médecin ou le dentiste), mais que quand ce n’est pas une question de vie ou de mort, de santé ou de mise en sécurité immédiate, est-ce qu’il a le droit de refuser des activités ou des situations qu’il trouve inconfortable ou qui ne l’intéressent pas ? Et si une situation désagréable n’est pas évitable, est-ce que tout ce qui est possible de faire a été fait pour identifier et résoudre son inconfort ?

7. Est-ce que la tristesse, le deuil ou l’anxiété sont exprimés comme de la colère ou de l’irritabilité ? (C’est TRES commun chez les personnes autistes). Est-ce qu’il a perdu un membre de la famille, un ami, un camarade favori, un animal de compagnie ou un membre de son personnel de soutien récemment ?

8. Est-ce que ses plans, routines ou besoin de ritualisation ont été dérangés ? Est-ce que quelque chose a changé récemment dans son environnement, vie familiale ou milieu social ?

9. Est-ce qu’on lui a fait faire un bilan médical complet avec des analyses sanguines récemment ? C’est possible qu’il ait mal ou soit inconfortable à cause d’une condition médicale que l’on peut traiter ou d’une allergie, une sensitivité problématique et qu’ils n’arrivent pas à l’exprimer verbalement ? (Même chez les personnes verbales, l’alexithymie, les difficultés à percevoir son corps, ses besoins ou sa douleur, et l’entraînement à l’obéissance et la normativisation peuvent rendre la communication par rapport aux maladies ou à la douleur compliquée). Les problèmes de nutrition et de métabolisme peuvent entraver notre capacité à nous auto-réguler.

10. Est-ce qu’on lui accorde assez de temps calme et d’intimité ? Ou est-ce que son emploi du temps, entre l’école et la thérapie, est tellement rempli que c’est comme s’il travaillait deux travails à temps plein ? Est-ce que sa capacité à faire plusieurs choses à la fois ou à traiter les informations est submergée ? Nous sommes très vulnérables à la surcharge sensorielle, émotionnelle ou d’informations. Est-ce qu’il a vraiment du temps libre où il choisit ce qu’il veut faire et s’il veut être seul ? Est-ce qu’il a un espace qui lui appartient ?

Les micro-agressions validistes

Dans tous les cas, l’attitude que vous pouvez avoir face à votre enfant peut aussi jouer sur son agressivité. L’agressivité peut être aussi une forme de résistance face à des micro-agressions à l’impact psycho-émotionnel fort. Si vous êtes vous même neurotypique ou valide, vous ne pouvez pas forcément comprendre que votre point de vue n’est pas universel. Si vous considérez certaines choses comme la norme, ce ne sera pas le cas pour votre enfant qui se sentira opprimé dans son fonctionnement particulier ou vis à vis d’une action qu’il ne peut pas accomplir.

Ces microagressions sont des remarques d’ordre validiste et psychophobe sur sa façon d’être : ne pas respecter son espace personnel et son corps, réprimer son stimming et ses gestes répétitifs, sa façon de parler, de regarder, de manger ou de faire les choses (s’il lave la vaisselle vous devez l’encourager et le féliciter pas lui dire que ses gestes sont trop brusques ou trop lents). Ces remarques peuvent être ressenties de manière très violentes en lui et déclencher une anxiété ou de la colère. Il est important de ne pas surréagir à ses comportements, de ne pas crier fort (sensibilité sensorielle) ou de pratiquer la punition, sur la base de son fonctionnement.

Ces remarques génèrent un sentiment d’infériorité et d’anormalité qui causera un impact psychique très important dans la construction de son estime de soi. Votre enfant a un autre fonctionnement moteur, cognitif et émotionnel, il ne peut pas agir de la même façon que vous le faites. Chaque parent a sa propre éducation, mais votre enfant se sentira mieux en étant permis d’être lui-même et en étant traité à égalité avec les autres. Sinon il ressentira que votre éducation est différente de ses frères et sœurs, sur la base de son handicap et il se défendra en conséquence. La seule limite à ses réactions est qu’il respecte votre propre consentement et cela s’apprend aussi. La neurodiversité est d’accepter que différents chemins soient possibles pour arriver au même résultat, sans juger.

Enfin, quelque chose que l’on recommande vraiment, si vous êtes à la recherche de plus d’aide, c’est de trouver un adulte ou mentor autiste près de chez vous qui peut vous rencontrer, vous et votre enfant, observer son environnement et ses interactions et vous donner leur impressions sur quels changements pourraient être utiles pour lui.

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