Vacuum challenge, Faux-semblants et Justice française validiste

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Tribunal de Justice de Blois.

CLE Autistes avait prévenu que les mesures sanitaires appliquées pendant le confinement, renforceraient la fréquence des actes de maltraitance (souvent banalisés) sur les personnes hébergées en foyers, EHPAD, et autres établissements spécialisés.
Des établissements devenus très hermétiques, de mars à juin 2020. Ils continuent à l’être en cas de suspicion de cas de covid 19 : la loi est confiée aux gestionnaire d’établissements.


       Heureusement, on a pu compter sur l’initiative de trois éducatrices de l’IME (Institut Médico Educatif) de Naveil, dans le Loir et Cher.Elles ont visibilisé sur le réseau social Facebook, une activité réalisée dans la bonne humeur, pendant cette période ennuyeuse.
On y découvre, dans une petite vidéo filmée par une de ces éducatrices, Xavier, 12 ans, autiste, confié à l’IME durant le confinement, enfermé dans un sac poubelle (neuf, quand même) jusqu’aux aisselles, une tête d’aspirateur placée à proximité de son visage par les deux autres éducatrices.
Le nom de cette nouvelle lubbie de désœuvrée.s (elles racontent elles-mêmes qu’elles testaient ce petit jeu entre elles, sur leur lieu de travail, sûrement pendant un temps de pause…) est “vaccum challenge”.
Lorsque cette activité est pratiquée par des personnes majeures sur une personne mineur.e de moins de 15 ans, en situation de handicap, sans son consentement, on appelle ça comment ?

En effet, Xavier, 12 ans, passait par là. Et la vidéo montre la contrainte exercée sur lui par les éducatrices trentenaires, pour le faire entrer dans le sac poubelle.On l’entend gémir sur la vidéo.Il n’y entre pas spontanément, contrairement à ce qui est dit lors du procès qui s’est immanquablement tenu suite à la diffusion de ces images.
D’ailleurs, qui aurait douté qu’un procès ne soit pas intenté contre ces trois femmes par les parents de Xavier ?
Pas les trois protagonistes apparemment,  puisqu’elles qualifient, a posteriori, leur acte de “bêtise professionnelle” (il fallait oser l’emploi du qualificatif)


Alors quoi, une petite tape sur les doigts et on n’en parle plus ?


Pas loin : ces 3 femmes accusées de “violence sur personne vulnérable et diffusion d’images relatant une atteinte à l’intégrité”, ont été acquittées en comparution immédiate suite à 48h de garde à vue.
Car il n’y a pas de qualifications juridiques ni d’articles dans le code pénal permettant de sanctionner cette simple “bêtise professionnelle”.
Ni les moyens permettant d’accéder à une mesure de justice spécifique. 
La Nouvelle République, journal local, relaye l’affaire en des termes plutôt complaisants à l’égard des trois malheureuses : elles auraient, elles aussi,  vécu “une épreuve”, ces “professionnelles pourtant expérimentées et dévouées”, en ayant dû passer la “fête des mères dans une cellule de commissariat”.

Comment leur faire oublier cette douloureuse mésaventure ? Un petit stage d’éthique et d’empathie ?
Elles trouveront peut-être le temps de faire une introspection, puisqu’elles ont été licenciées, malgré l’acquittement… et là, ça manque de cohérence, non ?
À quoi rime d’exiger un renforcement des peines, ou l’incarcération de professionnelles maltraitantes ? “La prison à vie”, un souhait d ‘association de parents…Allons plus loin, si cela est possible…

-Pourquoi ne pas réaliser un fichier national ou figurerait un rapport sur les états de service de ces éducatrices maltraitantes, visible par les employeur.euses potentiel.les, mentionnant qu’il est préférable de ne pas leur confier de public mineur et en situation de handicap, par exemple ? …
-Pourquoi ne pas faire passer une évaluation aux DRH pour mesurer leur capacité à recruter les éducateur.ices les plus dévoué.es ? Et sanctionner la direction concernant le manque de flair du/de la DRH en cas de “bêtise professionnelle” commise par l’éducateur.ice ?
-Pourquoi ne pas mettre les moyens sur la prévention, pour dispenser une formation de base ET une formation continue dignes de ce nom ? (C’est plus politiquement correct comme suggestion, et ça ne coûte rien…)…

Peu importe.


Parce que le problème de fond, c’est l’IME.


Un établissement où on n’est pas libre de ses mouvements, où on prend le risque de se voir embarquer dans une activité déplaisante au détour d’un couloir, où on doit s’adapter en permanence aux plannings du personnel, aux temps obligatoires de socialisation (lever, coucher, repas …), au régime alimentaire majoritaire et souvent qualitativement médiocre…
Comment comprendre le concept d’autonomie, l’acquérir, le pratiquer, se découvrir en tant que personne à part entière, dans un contexte aussi normatif de régiment militaire?
La bientraitance est une chimère dans ce type d’établissements où l’individu est privé de ce qui pourrait faire de lui une personne épanouie, toute sa vie est exposée au regard de professionnel.les divers.es et varié.es., sa vie est en leur pouvoir.
Les personnes adultes hébergées dans ce type d’établissements sont immédiatement placées sous une mesure de privation de la capacité juridique (tutelle/curatelle), elles ne peuvent plus accéder à la justice.


Leur vulnérabilité est totalement construite.
La bienveillance du personnel, même “expérimenté et dévoué”, n’est qu’un argument hypocrite pour justifier l’enfermement d’une catégorie de personnes, et l’existence de ce type de structure.


Les parents de Xavier pensaient pourtant que cet IME-là était « au top de l’encadrement », Xavier ayant déjà vécu une expérience maltraitante dans un autre établissement …


La solution anticapacitiste ne peut donc être qu’anticarcérale, car les institutions de type IME sont des lieux carcéraux au même titre que les prisons et les hôpitaux psychiatriques.
CLE Autistes avait saisi le Conseil d’Etat pendant le confinement pour demander à reconnaitre les institutions comme des lieux de privation de liberté.
D’ailleurs, la convention de l’ONU relative aux droits du handicap demande l’abrogation du système de tutelle pour le remplacer par un régime de décision assistée et demande l’accès à la justice et aux juges pour les personnes handicapées, en leur nom et avec le soutien nécessaire. 


A partir du moment où la privation de capacité juridique est acceptée dans le droit français, que les IME continuent d’exister,  la société française tolère les abus commis sur Xavier, tant que cela reste exceptionnel…

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